Simon Boileau et Florent Pierre, co-auteur de la BD La Ride parue récemment aux éditions Dargaud forment un duo inséparable. Ils sont partis pour un voyage à vélo de Paris à la Bourgogne, retrouver le plaisir des choses simples, ouvrir les yeux et re-découvrir la France.
Comment avez-vous commencé le vélo ?
Simon : On faisait du vélo quand on était enfant, comme beaucoup de monde. Puis, quand on s'est rencontré à Lyon pendant nos études, on se déplaçait au quotidien en ville à vélo jusqu’à ce beau jour de l’été 2015… On a eu un peu une lubie. On a vraiment l'impression littéralement d'inventer la roue, ou plutôt de la réinventer. On s'est dit “Tiens, on va prendre une tente, on va prendre nos vélos, et on va partir sur la route !”. C’était notre premier voyage à vélo ! On est parti de chez Florent en Bourgogne pour aller jusqu’à chez moi, en Auvergne, limite Lozère. On a découvert le sentiment d’exploration, sans vouloir forcément aller plus loin ou plus vite. Ce qui nous a tout de suite plus, c’est le rapport au territoire, au temps qui passe, le fait d'être toujours dans le présent : on roule, on a faim, on avance.
Quel a été le déclic pour raconter vos aventures à vélo en bande dessinée ?
Simon : C’est le mélange de deux passions. On a adoré le voyage à vélo, les sensations que ça procurait. On a continué nos petites échappées. Chaque année, deux fois par an parfois, on faisait un petit bout de France à vélo. On se fixait des objectifs sur une petite semaine en général. Et comme on est passionné de bande dessinée et qu'il nous est arrivé plein d'histoires, à un moment, on s'est dit “on va ouvrir un compte Instagram et raconter nos histoires en bande dessinée”. C’était l'occasion de montrer à nos amis ce qu’est le voyage à vélo. Parce qu’ils nous voyaient souvent revenir un peu rougeaux avec des coups de soleil, des lèvres gercées, des courbatures partout et ils se demandaient “mais qu'est ce qu'ils font ? Pourquoi ils aiment ça ?”
Florent : Petit à petit, on a découvert que des gens sur internet s'intéressaient à tout ça ! En 2020, on a gagné un prix au festival de BD d' Angoulême récompensant nos strips publiés en ligne. C’est là que l’on s’est fait remarquer par les éditions Dargaud. Avec le projet de cette première bande dessinée, on a dû un peu réduire la cadence à vélo, puisque c'est difficile de pratiquer le dessin tout en roulant, c'est soit l'un soit l’autre (rires).
Dans La Ride, vous voyagez de Paris à la Bourgogne à vélo, pourquoi avoir choisi cet itinéraire ?
Simon : L’idée était de raconter une histoire, avec une progression. De se poser la question de ce que représente le voyage à vélo pour nous. Qu’est ce que cela nous apporte et pourquoi on roule finalement ? Voilà comment on a pensé à la Bourgogne. C'est l'endroit d'où nous étions partis la première fois à vélo ensemble. Et puis cela nous permettait d'approcher un peu le rapport affectif de l’un de nos personnages. En fait, ils en ont tous les deux ras le bol de Paris et de la routine. Et le voyage à vélo arrive comme un échappatoire où chacun a en tête un idéal. Dans la BD, le personnage de Flo va se projeter dans un rapport un petit peu nostalgique à son village d’enfance, il va plus regarder vers le passé. L'autre se dit que le voyage à vélo, c'est aligner les kilomètres et partir le plus loin possible, c’est se projeter davantage vers le futur. C’était l’idée initiale qui a fait naître ce voyage entre Paris et la Bourgogne à vélo.
Flo : On a souhaité éviter l'écueil chronologique et plutôt condenser dans cet album tout ce qu’on a vécu ensemble à vélo. Même si l’histoire se passe en Bourgogne, on voulait décrire le plaisir du voyage avant tout. On a évacué tout de suite le côté performance, on n’est ni des champions ni des aventuriers. Le voyage à vélo est pour nous un moyen de poser un regard sur le territoire. Qu’est-ce qu’on voit depuis le guidon.
Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur cette aventure à vélo ?
Simon : De Paris à Saint-Gengoux-le-national, le village d'origine de Florent en Saône et Loire, on a balayé pas mal d'environnements différents. On doit d’abord traverser la banlieue, l’architecture sans âme des quartiers périphériques, avec toujours ce côté labyrinthique où on a l'impression de ne pas s'en sortir au milieu des pavillons, des zones commerciales. Ce sentiment qu’à vélo, on n'est pas trop à notre place. Ce sont des territoires calibrés pour les voitures…
Flo : Oui, on a toujours cette frayeur de se retrouver rembarqué sur une voie rapide et de pas pouvoir s'en sortir (rires).
Simon : Après la sortie de Paris, on a bien quitté la ville mais on n’est pas encore vraiment à la campagne. Enfin si mais une campagne où tout est rasé net avec de vastes zones en monoculture. Comme si on avait l’impression de ne pas avancer et que le paysage ne défile pas. L'arrivée au Morvan nous a marqué. A partir de là, c’est beaucoup plus sauvage, tout est très vert ! Et l'irruption du dénivelé aussi vient pimenter un peu le voyage.
Flo : Disons qu’au Morvan, nous avons volontairement décidé de ne pas emprunter la voie la plus simple. On a eu les mollets qui ont chauffé. On savait que ça allait être le climax du voyage. C’était un peu dur mais on avait un objectif.
5 jours sur les routes de France à vélo, c’est dépaysant donc ?
Flo : On pratique le vélo sur des petites périodes. On n’est jamais parti longtemps. Ça doit être chouette mais notre pratique est différente. C’est ce qu’on a essayé de développer dans la bande dessinée. Pour nous le vélo est une vraie respiration dans notre quotidien. On essaye simplement de voler des moments d’évasion. On a 3-4 jours et hop ! On part.
Simon : Même traverser Paris, on le vit autrement. Ce qu'on voulait aussi raconter dans le livre, c'est qu'à vélo, tout est décuplé et plus intense. Aussi parce qu’on a envie d'avancer. On a peu de jours et il faut en profiter. 1 journée, 1 mois, en France ou ailleurs, peu importe, le voyage à vélo, c’est plus un état d’esprit.
Qu’est ce que vous aimez dans le voyage à vélo ?
Simon : Partir pas trop loin et vivre le moment à fond. C’est notre manière d’envisager le voyage à vélo. On vit mille aventures à l'heure et on est dans l’essentiel, dans l'instant. En fait, on est un peu prisonnier, pour le meilleur et pour le pire, de l'instant présent. Si on traverse un endroit qui n'est pas sympa ou si il y a du vent ou de la pluie, on ne peut pas se cacher comme dans une voiture, remonter la vitre et se mettre à l'abri. Ça fait partie du voyage. Et cela fait d'autant plus aimer les petites choses et les plaisirs simples, genre le pain au chocolat qui nous attend à 2-3 h de route, on l'apprécie encore plus, au centuple.
Flo : Le vélo, je trouve que ça nous oxygène d'un coup. Le corps est mis à l'épreuve et quand on travaille comme nous derrière les écrans, ça nous fait sortir de notre torpeur, ça nous met plus facilement en lien avec les gens qu'on va croiser sur notre route. Le fait d'être en mouvement, c'est souvent là aussi que j'ai des idées qui viennent. C'est encore plus stimulant à deux car on échange même sur la selle.
Simon : Oui, il y a un côté pensée en mouvement, discuter et pédaler, réfléchir. L’angoisse de la page blanche s'envole quand on est en plein air, qu'on sort et qu'on pense à autre chose. D’un coup, tout se dénoue.
Flo : Il y a aussi ce fameux capital sympathie du deux-roues. Le cycliste qui déboule dans un village, il suffit qu’il ait l’air un peu perdu et innocent, et les gens viennent le voir. C’est un vecteur de rencontre puissant. C’est assez rare les fois où on n’a pas d’interaction dans une journée sur la route. Et pourtant, on n’a pas énormément d'audace, on n'est pas de ceux qui vont frapper chez les gens tous les soirs. On devrait peut-être oser d'ailleurs. Enfin, nous, même si on ne veut pas, on en rencontre. (rires).
Si vous aviez plus de temps, où aimeriez-vous partir en voyage à vélo ?
Simon : On a déjà hâte de partir cet été pour la promotion de l'album. Notre attachée de presse, qui est aussi passionnée de vélo, a imaginé une sorte de tournée-dédicace. On va réaliser des balades à vélo avec, au départ et à l'arrivée, des libraires qui nous accueillent.
Flo : Moi, j’aimerais découvrir l'Angleterre, l'Ecosse et l'Irlande. En France, j’irais bien rouler en Provence, sur les traces de Giono, que je lisais beaucoup, qui décrivait les paysages et me donnait envie d’y aller…
Simon : J’ai un rêve en tête, le bike rafting. Depuis les gorges de l'Allier, j’aimerai partir avec mon vélo sur un canoë léger, descendre le fleuve et puis enchainer sur du vélo. Ça prendrait un peu plus de 5 jours. On a plein d'envies et d'idées. Il y a tellement de possibilités en France…Cet été, j’aimerais bien découvrir le Colorado provençal aussi !
Quels sont les premiers retours de votre bande dessinée ?
Simon : On est content que ça parle à beaucoup de monde. Notre ambition était quand même de raconter notre expérience pour donner envie à des gens qui ne l'ont jamais vécu. Ça nous fait plaisir de rencontrer quelqu'un qui nous dit : “moi le vélo c’est pas mon truc, mais j’ai bien aimé comment vous m'avez raconté le voyage”. D'autres qui ont des craintes et nous disent “ça me donne envie, je vais m'organiser un voyage à vélo…”
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