Le voyage immersif, de l’Asie à la Drôme-Ardèche

Alexandre
26/2/2024
Lecture 11 min.

Avec des voyages « aventure » et itinérants à côté de chez soi, Chemins ambitionne de faire de la sobriété une source de plaisir, en proposant une offre immersive, sportive et inclusive. L’équipe fait le pari d’une nouvelle voie possible dans les territoires préservés de la Drôme et l’Ardèche, avec la volonté de ré-enchanter l’imaginaire des voyageurs.

Durant ce premier quart de siècle, les aspirations des voyageurs privilégiés européens furent pour les voyages lointains, exotiques, avec une touche de plus en plus marquée pour la personnalisation, l’authenticité, et parfois l’aventure. Depuis quelques années, et surtout à la suite de la crise du Covid-19, une tendance émerge : celle d’aller moins loin, d’utiliser des transports plus propres, de ne plus courir d’un lieu à l’autre mais de prendre son temps.

L’appel du monde lointain

En 2005, lorsque j’ai fondé Shanti Travel, une petite partie des voyageurs aspiraient au voyage ‘’aventure’’ (trek et randonnée) et  au voyage ‘’sur mesure’’ dans des destinations exotiques, à l'autre bout du monde. Ces segments se sont fortement développés depuis au sein de la classe moyenne et supérieure. 

Pour répondre au mieux aux attentes concernant ces deux types de voyages, mais également pour satisfaire aux exigences en matière de tarifs, nous avons créé Shanti Travel avec mon associé, Jérémy Grasset, sur le modèle d’affaires d’une agence locale, que l’on a d’abord développé en Inde, avant de le dupliquer sur d’autres destinations en Asie, à commencer par le Sri Lanka, l’Indonésie et le Vietnam.

Le fait d’avoir des équipes d’experts sur place permet en effet de créer des voyages réellement hors des sentiers battus, mais « cousu main » grâce à l’expertise locale de la destination, et de proposer des tarifs plus avantageux que les agences basées dans le pays émetteur, en raison de la suppression de la marge de ces agences. Une troisième conséquence de ce modèle est celle de l’équité : le paiement du voyage est intégralement reversé au pays récepteur, qui profite ainsi de cette manne économique, notamment en matière d’emplois et de taxes. 

Des voyages de plus en plus immersifs et en quête de sens

Au fil des années, Shanti Travel a accentué l’expérience immersive. Nous avons créé des offres « Vis ma vie » avec des familles d’agriculteurs balinais, birmans, des éleveurs mongols ou encore des potiers népalais. Les retours d’expérience des voyageurs mentionnent quasiment tous que le souvenir le plus fort de leur voyage est celui de ces rencontres, beaucoup plus que le fait de voir « en vrai » le Taj Mahal ou l’Everest. L’hébergement n’a pas été en reste avec le développement de nuits chez l’habitant.

Nous avons ensuite réduit le nombre de vols intérieurs pour les remplacer par des trains là où c’était possible, principalement en Inde, au Vietnam et au Japon. Enfin, le rythme de nos voyages s’est ralenti, en matière de kilomètres parcourus, de points d’intérêt visités, tandis que le nombre de jours sur place a augmenté graduellement ces dernières années.

Ces changements ont été conceptualisés et mis en place par les équipes de Shanti Travel, d’abord pour favoriser davantage l’immersion du voyageur et, depuis 2015, pour répondre aux enjeux du réchauffement climatique. Pour les déplacements en véhicule privé, nous avons commencé dès 2015 à privilégier les véhicules hybrides, de plus en plus présents dans certains pays asiatiques, comme au Sri Lanka ou encore au Japon.

À partir de 2017, nous avons mis en place le calcul de l’impact carbone de nos voyages et, dès l’année suivante, nous avons commencé à participer à des projets de reforestation dans certains des pays dans lesquels nous sommes présents, comme l’Indonésie, l’Inde, le Sri Lanka et le Népal. Notre action est double : d’une part, la mise en œuvre de tous les moyens susceptibles de ré- duire l’empreinte carbone de notre activité ; de l’autre, notre participation financière à des pro- jets de reforestation, dont les caractères additionnels et pérennes sont certifiés, qui permettent d’absorber la totalité des émissions de CO2 liées à nos voyages.

En parallèle, deux nouvelles marques ont vu le jour : l’une pour répondre à l’envie de combiner voyage aventure immersif et voyage sur mesure avec la création de Shanti Trek, et l’autre pour favoriser davantage le voyage en quête de sens avec Shanti Om, qui propose des voyages spirituels, intérieurs et de bien-être. 

Voyage de 1 mois et demi à vélo électrique au Rajasthan

Le voyage régénératif

Aujourd’hui, en France, nous voyons les prémisses d’une tendance à privilégier des transports peu polluants, à ralentir pour s'immerger dans un territoire, à prendre soin de son corps et de son esprit, à profiter de fantastiques paysages naturels et d’un patrimoine culturel incroyable qu’on trouve en hexagone, mais aussi de plaisirs simples, comme de faire une sieste à l'ombre d’un olivier, aller à la rencontre d’une fromagère et lui acheter son picodon en circuit-court ou se baigner dans une rivière à l’eau pure. Une manière de voyager plus clairvoyante, plus présente, plus authentique et plus consciente. Un voyage plus sobre en somme ! 

Les derniers rapports du GIEC sur le réchauffement climatique sont désormais connus de tous, tout comme l’impact de l’aérien sur l’empreinte carbone. Cette réalité modifie le comportement des voyageurs. Ainsi, selon une étude Kantar, 64% des Français se sentent concernés par la notion de tourisme durable. Et 16% considèrent l’empreinte carbone comme un facteur essentiel de leur choix de destination.

C’est dans ce nouveau contexte qu’avec Etienne Giroud, j’ai cofondé Chemins en 2022. Nous créons des voyages itinérants et ressourçants à vélo à Assistance Électrique en Drôme-Ardèche et dans le Vaucluse, avec pour objectif de ré-enchanter l’imaginaire des voyageurs et découvrir une autre vision du voyage immersif.

Plusieurs facteurs ont été déterminants dans cette volonté de créer cette offre de voyage : 

La naissance de ma fille en 2015 m’a mis en contact avec la réalité de la situation climatique, en me projetant sur son avenir et celui de sa génération. 

Dans la foulée, la lecture d’ouvrages tels que ‘’Effondrement’’ de Jared Diamond ou ‘’Comment tout peut s’effondrer’’ de Pablo Servigne m’ont d’abord mis dans un état d’éco anxiété vis à vis de la situation du monde, de la responsabilité humaine, et plus encore de ma responsabilité en tant que professionnel du voyage lointain nécessitant d’utiliser l’aérien, avant de me donner envie de trouver des solutions.

La mise sur le marché des vélos électriques avec une autonomie suffisante pour concevoir le voyage itinérant, puis l’arrivée des vélos cargo, qui permettent de se passer des véhicules pour assurer le portage des bagages et accueillir des enfants à l’arrière ont affiné les contours de l’offre itinérante à vélo proposée aujourd’hui par Chemins

Enfin, durant un trek de plusieurs mois en Himalaya en famille en 2019-2020 les mots d’Edgar Morin - ‘’Ne pas sacrifier l'essentiel à l'urgence mais obéir à l'urgence de l'essentiel’’ - et de Henry Miller - "Nul besoin de faire de la Terre un paradis : elle en est un. A nous de nous adapter pour l'habiter ‘’ n’ont cessé de raisonner, et cette expérience d’immersion itinérante m’a mis face à une évidence, celle de proposer une offre d’escapades et de voyages de proximité (acheminement possible en train), immersive (se sentire faisant Un avec la nature et rencontrer les habitants), sportive tout en étant inclusive (l’électrique permet au plus grand nombre de réaliser 50 km / jour) qui puisse répondre au défi de proposer des voyages régénératifs à des voyageurs pour qui le voyage est, a priori, synonyme de voyage lointain.

Chemins crée des voyages régénératifs en ce sens qu’ils répondent au triptyque suivant :

Positif pour les voyageurs qui sont déconnectés de leur quotidien pour se reconnecter au présent, à eux-même, à leur proches et à leur environnement de voyage.

Positif pour le territoire visité car nos itinéraires passent par des petites routes et des pistes carrossables qui sont très peu empruntées grâce à notre appli mobile, le guides des voyageurs, qui intègre des points d'intérêts au GPS, avec notamment nos bonnes adresses en circuit-court. Nous proposons aussi des rencontres avec des habitants qui font le territoire : apicultrice, lavandiculteur, vigneronne, maraîcher… des personnes engagées dans la préservation de leur territoire qui ont à cœur de partager leur savoir-faire le temps d’une dégustation ou d’un atelier créatif. 

Positif pour la planète car les émissions de CO2 durant les voyages à vélo électriques sont quasi nulles, et ce d’autant plus que nos camps de base, où l’on stocke le matériel et où l’on accueille les voyageurs sont situés à Montélimar, Tain l’Hermitage et Die, villes desservies par le train. Ainsi plus de 70% des voyageurs optent pour l’acheminement ferroviaire. 

Le pari de Chemins, c’est de faire ressentir aux voyageurs, celles et ceux qui prennent l’avion une ou plusieurs fois par an pour leurs vacances, qu’il n’est nul besoin de partir loin pour se sentir dépaysé et ressourcé. Il s’agit pour nous de démontrer que voyager dans les territoires de l’hexagone peut être un choix assumé, responsable, ou la sobriété est source de plaisir. Des plaisirs simples tournés vers les rencontres, les échanges, le partage, l’apprentissage, la santé, le bien-être, en tenant compte de l’empreinte carbone. 

Immersion en Drôme provençale. Crédit photo : Simon Saliot

L’offre de Chemins remplace-t-elle un voyage immersif à l'autre bout du monde? Nous ne le pensons pas, et nous ne le souhaitons pas car l’ignorance mène à l’intolérance. Continuer de voyager pour se confronter à l'altérité, comprendre le monde, l’aimer et contribuer à le rendre plus désirable est une nécessité. Notre contribution est de créer des expériences qui puissent supplanter les courts séjours à Barcelone ou à New York, et participer à faire prendre conscience aux populations privilégiées - les 10% de Terriens les plus fortunés sont responsables de 48% de toutes les émissions de gaz à effet de serre mondiales (1) - et participer à faire baisser le nombre de voyages lointains, qui dans un monde contraint, pourraient être plus intensément rêvés, réfléchis et préparés, moins fréquents mais plus longs, plus fléchés aussi en termes d’impact écologique et socio-économique.

Alors que la deuxième saison vient de s’achever pour Chemins, nous sommes devant de nombreux défis, les plus grands étant de développer l’offre sur de nouveaux territoires pour fidéliser et développer notre clientèle. Ce qui nous motive très fort à trouver les solutions pour pérenniser et développer l’activité de Chemins, c’est que notre objectif est atteint pour ce qui concerne le fait de participer à ré-enchanter l’imaginaire des voyageurs et faire découvrir une autre vision du voyage.

Les retours d’expérience des voyageurs, qui sont pour la plupart des primo voyageurs itinérants à vélo, insistent sur le fait que (re) découvrir leur beau pays à un rythme lent, en prenant le temps de profiter de tous les instants, leur ont procuré de belles émotions et de beaux souvenirs, et que la prochaine fois, ils voyageront plus longtemps sur les vélos.

Ainsi, le pari est gagné quant à démontrer que comme l’écrit Marcel Proust,  “Le seul, le vrai, l’unique voyage, c’est changer de regard.”

Article paru dans la revue ESPACES (janvier-février 2024)
Retrouvez tous les articles dans Itinérances, le blog de Chemins.
Alexandre
Ecrit pour Itinérances. Le blog du voyage en quête de sens

Nos engagements

Le voyage itinérant en mode Slow

Immersif

Des rencontres authentiques avec des acteurs locaux engagés et des itinéraires hors des sentiers battus

Cousu main

Nos voyages sont de pures créations.
Aucun intermédiaire

Local

Nous sommes sur place, passionnés par la richesse culturelle et naturelle de notre territoire

Flexible

Disponibles 6/7 de 9h à 19h, y compris le samedi

Qualité du matériel

Testé, éprouvé, certifié

Durable

Éphémère, bas-carbone, à impact positif pour vous et pour le territoire visité