Pastis-Momo ! Des Alpilles à l’Himalaya à vélo, le fabuleux destin d’Anaïs et Jessica

Sophie
10/1/2023
Lecture 11 min.

En mars 2022, deux femmes portées par leur désir de découverte partent à vélo du sud de la France jusqu’en Inde, pour rejoindre les montagnes himalayennes. Anaïs et Jessica souhaitaient répandre un message de paix, en accrochant des drapeaux de prières tibétains tout au long de leur parcours. Leur odyssée originale baptisée Pastis-Momo force l’admiration. Elles ont suivi leur route en montrant une sacrée capacité d'adaptation, qualité indispensable du voyageur pour arriver à destination. Rencontre.

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Jessica : Nous avons toutes les deux 29 ans, on s’est rencontrées en Inde, à Dharamsala, il y a quatre ans. On travaillait pour une agence de voyage. Anaïs est graphiste et illustratrice, et moi je suis dans la communication et le marketing. Depuis quelque temps, on a posé nos valises à Cabannes dans les Bouches-du-Rhône. Je vais être franche, à l'origine, je n'aime pas forcément le vélo. Ce n'est pas une passion, surtout quand ça monte…

Anaïs : Moi, c’est différent. Je n'ai pas le permis voiture, le vélo a toujours été un moyen de locomotion. J’habitais à la campagne en France, alors pour me déplacer et rejoindre les copains, ça a toujours été le vélo. C'est sûrement à cause de moi que tout a commencé. J'ai peut-être un peu forcé Jessica à monter sur un vélo (rires).

Comment est née l’idée d’un départ sur les routes pour un long voyage à vélo en mars 2022 ?

Jessica : Nous vivions à l'étranger, et avons dû rentrer en France à cause du covid. A ce moment-là, nous avons décidé de partir à vélo en France, sur la via Rhôna, le canal du midi et le canal de Garonne, pendant un mois. C’était une vraie bouffée d’air en plein covid. Ce voyage en France me paraissait déjà être une sacrée aventure, quelque chose d’un peu fou. Enfin d’un peu compliqué. Et au final, ça s'est avéré plutôt fluide, agréable, et même facile. Peut-être parce que c'est particulièrement plat le long des canaux (rires).

Anaïs : Un an plus tard, on s’est retrouvé dans un festival de descente en VTT dans les montagnes. Il y avait une projection de plusieurs films dont l’un racontait l'histoire de deux frères partis du Mexique au Canada pour rejoindre la plus grande bosse du monde à vélo. Au début ça nous a fait marrer, et puis très vite une idée a germé. Ça faisait un petit moment que toutes les deux avions envie de retourner en Inde. A la fin du film, on s'est dit : mais attends, pourquoi ne pas aller en Inde à vélo ?

Jessica : Nous étions en septembre et l'hiver arrivait, on s’est donc dit sagement qu’on n’allait quand même pas partir en hiver, pas la peine de nous rajouter de la difficulté ! On a décidé de partir au mois de mars, cela nous laissait un peu de temps pour réunir du monde autour de notre projet. 

Anaïs : On a choisi la date du 10 mars, c'est une date de commémoration du soulèvement tibétain de 1959. Un petit clin d'œil symbolique à cet épisode historique. On avait envie pendant ce voyage de hisser les drapeaux de prières tibétains sur la route. Comme un simple message de paix et d'harmonie. 

Racontez-nous l’itinéraire que vous avez réalisé pour cette traversée de la France jusqu’à l’Himalaya ?

Jessica : Au début, notre tracé était plus qu'approximatif. Il fallait surtout savoir quel pays on allait traverser afin d’avoir une idée pour les visas. On envisageait d'emblée d”éviter les Alpes, car on n'a jamais fait de vélo en montagne ni franchi des cols. On est donc passer par l'Italie et la plaine du Pô.

Anaïs : Puis Slovénie, Croatie. On a souhaité faire un petit crochet par la Bosnie, puis retour en Croatie, Monténégro, Albanie, Macédoine du nord, Grèce. Après, on devait prendre le ferry en Bulgarie pour traverser la mer Noire et rejoindre la Géorgie. Mais nous avons eu des imprévus et à la dernière minute, on s’est dit “mais pourquoi on ne passerait pas par la Turquie ?”

Jessica : On a adoré la Turquie. On a traversé tout le pays jusqu’à la Géorgie. Là, on s’est dit qu’on ne pouvait pas voyager en Géorgie sans aller dans les montagnes. Donc on s'est mis un vrai coup de pied aux fesses. Et on ne l'a pas regretté ! Après, on voulait aller en Azerbaïdjan pour prendre un ferry et traverser la mer Caspienne. Mais malheureusement, le pays n'a jamais ouvert ses frontières terrestres. Donc on est allé en Arménie, un pays rempli de montagnes… On s'était pourtant bien dit avant de partir “jamais de la vie l’Arménie”. (rires).

Anaïs : Comme quoi on aurait dû s'écouter, car en Arménie, après avoir traversé les trois quarts du pays, il y a eu des bombardements. Donc a fait demi tour jusqu'en Géorgie puis retour en Turquie, d’où nous avons rejoint l'Iran. C'était politiquement compliqué en Iran, surtout à ce moment-là. Ensuite, nous avons pu rejoindre Dubaï et prendre un avion pour la dernière partie jusqu’en Inde. En fait, rien ne s’est passé comme prévu… 

Deux femmes seules qui voyagent à vélo jusqu’en Asie, vous avez dû susciter la curiosité des gens rencontrés en chemin, comment avez-vous été accueillies ?

Anaïs : Qu'importe qui est sur le vélo, homme ou femme, quand tu arrives avec une monture chargée et que tu n'as pas l'air d'être du coin, tu suscites tout de suite la curiosité. 

Jessica : Oui, même en France, on ne pouvait pas s'arrêter faire une pause sans que quelqu'un vienne nous parler.

Anaïs : L'accueil qui nous a été réservé ne dépendait pas du tout du fait que l'on soit deux femmes. On a reçu un accueil chaleureux partout. Plus on avançait sur notre route vers l'Est, plus les gens étaient chaleureux et les portes s'ouvraient ! Avec la palme pour la Turquie et l'Iran. 

Jessica : Les gens ne nous donnaient pas de leçons, ils se demandaient juste qu'est ce qu’on faisait là toute les deux. Ils nous posaient des questions : où sont tes enfants ? et ton mari ? Il y avait une forme d'admiration mêlée d'incompréhension. Nous aussi à vrai dire, parfois, on se demandait qu’est-ce qu’on faisait là… 

Si vous deviez nous parler de votre meilleure expérience pendant ce voyage, laquelle évoqueriez-vous et pourquoi ?

Jessica : C'est une question à laquelle on est incapable de répondre. Parce qu'il s'est passé tellement de choses positives. Il y a eu des galères mais c'est minime par rapport au positif. On a tendance à les raconter peut-être parce que c’est plus croustillant. Le vélo facilite vraiment le contact. Tu ne peux pas te cacher dans une carrosserie, tu vas échanger un sourire ou trois mots facilement, même en restant sur la selle. Impossible donc de citer toutes les rencontres. Mais une rencontre a marqué notre voyage en Géorgie. On arrivait en Svanétie, où nous avons trouvé les gens assez austères et souvent un peu trop alcoolisés. On s'est fait beaucoup alpaguer par des hommes ivres (Voilà qui répond à ta question d'avant je réalise). On en avait vraiment marre. On se disait, ce serait tellement plus facile d’être un homme pour voyager. C'est injuste. Bref, le lendemain matin, quand on a repris la route, un gros chien de berger s'est mis à nous suivre pendant 30 km, jusqu'à ce que l'on s'arrête pour manger. Cette même journée justement, deux hommes un peu trop alcoolisés s'arrêtent et commencent à nous tirer par le bras etc. Le chien a commencé à les attaquer. Là on s’est dit, wow ! Ce chien, on ne le connaît pas, il s'est mis à nous suivre sans qu'on lui ait donné à manger ou quoique ce soit, et en plus il nous défend ! Le plus fou, c’est qu’il nous a suivi pendant plus d'une semaine, environ 150 km dans les montagnes en Svanétie. 

Anaïs : Oui c'est drôle, car la veille on se disait, si on avait un chien, on nous embêterait moins non ? Quand on était trop éloignée l'une de l'autre, j'avais l'impression qu'il nous rassemblait, comme des bêtes. Je me demande s'il ne nous prenait pas pour son troupeau de vaches. On ne sait pas trop (rires). 

On a pu voir sur les réseaux sociaux une rencontre émouvante entre vous et le Dalaï Lama à Dharamsala. Comment avez-vous été accueillies ?

Jessica : On a d’abord été relativement mal accueillies, dans le sens où on nous a fait les poches, on nous a fouillé et confisqué la mignonette de pastis qu’on voulait offrir au Dalaï Lama. Nous ne vous recommandons pas cette rencontre, ça ne vaut pas le coup (rires).

Anaïs : On voulait faire boire du pastis au Dalaï Lama, mais on n’a pas eu le droit. Tous ces kilomètres pour se faire rembarrer.

Jessica : Plus sérieusement, ça été très court et, oui, on a été extrêmement bien accueillies par sa Sainteté. A notre grande surprise, il y avait un interprète qui s’occupait de lui traduire notre projet. On lui a offert un petit livret avec le résumé du voyage. L'interprète lui a raconté que nous étions venues à vélo depuis la France, que nous avions hissé des drapeaux de prières sur la route, notamment pour le Tibet. Et là, surprise : il nous a remercié ! C’est drôle car on aurait plutôt eu tendance à lui dire merci à lui de nous accueillir. C’était rapide, on est resté un peu bouche bée. Et on a réalisé après coup que c’était assez incroyable comme rencontre. On n'imaginait pas qu’un jour ce soit possible. Comme quoi ça vaut le coup de faire huit mois de vélo. (rires)

La prochaine aventure, vous l’avez déjà en tête ? 

Jessica : On ne planifie pas vraiment les choses à l'avance, pour l'instant on prévoit de rester en Inde jusqu'en avril. Pour les projets à venir, on est en train de faire un film qui retrace notre voyage, et un livre illustré avec les illustrations d'Anaïs.

Retrouvez leur récit en texte et photos sur leur site internet : https://pastis-momo.com/

Sophie
Ecrit pour Itinérances. Le blog du voyage en quête de sens

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